L’Allemagne « reconnaîtra et ne s’opposera pas » aux projets visant à reconnaître la contribution de l’énergie nucléaire aux objectifs de décarbonation européens, a déclaré jeudi (9 mars) un conseiller spécial du Chancelier allemand Olaf Scholz.
Lors d’une table ronde organisée par l’Institut Jacques Delors à Paris, Jörg Kukies, bras droit de M. Scholz en charge des questions européennes et financières, a souligné que l’Allemagne reconnaîtrait et ne s’opposerait pas au nucléaire comme source d’énergie bas carbone, apte à contribuer aux objectifs de décarbonation de l’UE.
Il a par ailleurs confirmé que l’Allemagne serait prête à importer de l’hydrogène français produit à partir de nucléaire.
« Nous n’érigerons pas de barrières ni ne créerons de règles discriminantes contre l’hydrogène produit à partir de l’énergie nucléaire », a souligné M. Kukies.
L’hydrogène peut être produit par électrolyse de l’eau, créant ainsi un gaz qui n’émet pas de CO2 lorsqu’il est brûlé dans des processus industriels.
L’Allemagne et la France ont toujours été en désaccord sur le nucléaire. Alors que la France s’engage tous azimuts dans le nucléaire depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, l’Allemagne met en œuvre un programme ambitieux d’énergies renouvelables, visant à produire 100 % de l’électricité du pays des renouvelables d’ici 2035.
Ce programme sera complété par des centrales à gaz pour les cas d’urgence, qui brûleront de l’hydrogène, selon le gouvernement.
Comment aligner une volonté allemande assumée de sortir du nucléaire tout en important de l’hydrogène d’origine nucléaire français ? C’est une « dichotomie très convaincante », a ajouté le fonctionnaire, car elle encourage l’UE à diversifier son bouquet énergétique, plutôt que de dépendre d’une seule et même source.
La Première ministre Elisabeth Borne a quant à elle déclaré la semaine dernière qu’elle « partageait des interrogations » quant à la stratégie énergétique de l’Allemagne, qui s’apprête à fermer ses dernières centrales nucléaires d’ici avril 2023.
La France, fer de lance pronucléaire européenne
Paris se bat depuis longtemps pour que l’hydrogène produit par le nucléaire soit considéré comme « vert » selon les nouvelles règles européennes — et donc de bénéficier de financements européens pour développer la filière.
La France a également été à la pointe de la défense du nucléaire européen. EURACTIV France révélait fin février que la France serait le chef de file d’une nouvelle « alliance nucléaire » avec 10 autres États membres afin de « coopérer plus étroitement » sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement nucléaire et de promouvoir des « projets stratégiques » pertinents — une alliance dont l’Allemagne ne fait pas partie.
Si M. Kukies semble suggérer que l’hydrogène produit par l’énergie nucléaire ne fera pas l’objet de discrimination, il a également précisé que l’énergie nucléaire ne peut contribuer que dans une certaine mesure à la transition écologique de l’Union européenne.
En effet, l’énergie nucléaire, même bas carbone, ne devrait pas être considérée comme « équivalente » aux énergies renouvelables dans le cadre de la directive européenne sur les énergies renouvelables, a-t-il ajouté.
Une révision de la directive sur les énergies renouvelables, qui fait actuellement l’objet de négociations, imposerait un objectif de 45 % d’énergies renouvelables pour l’ensemble de l’UE d’ici 2030.
Stasource ; euractiv