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EXCLU : La Bulgarie a « Indirectement » Fourni Des Armes À L’ukraine

Plusieurs milliards d’euros d’armes bulgares ont été officieusement fournis à l’Ukraine par le biais de pays tiers ces deux dernières années, selon une enquête menée par EURACTIV Bulgarie.

Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, Kornelia Ninova, alors vice-Première ministre et ministre de l’Économie bulgare, a réaffirmé qu’elle n’autoriserait pas l’exportation d’armes bulgares vers l’Ukraine. Elle avait fait cette promesse pour la première fois lors d’un entretien télévisé, quatre jours seulement après le début de l’invasion en février 2022.

L’envoi d’armes à l’Ukraine est en outre devenu un sujet de discorde majeur entre les partis russophiles et pro-occidentaux en Bulgarie après le début de la guerre.

Pourtant, dès octobre 2022, EURACTIV révélait que Sofia fournissait très discrètement des munitions à l’Ukraine – malgré le mutisme du gouvernement.

Pas d’accord, mais des armes

Fait notable, aucun accord de coopération entre la Bulgarie et l’Ukraine existe. C’est donc de la manière la plus officieuse que des armes transitent, par le biais de pays tiers, de Sofia vers Kiev.

En un an, c’est l’équivalent d’un milliard de dollars d’armes et munitions qui a traversé les frontières pour arriver jusqu’en Ukraine, selon les informations d’EURACTIV.

« Du 24 février 2022 au 19 janvier 2023, aucune licence d’exportation n’a été ni demandée ni octroyée par les institutions ukrainiennes », selon la réponse officielle du ministère de l’Économie bulgare, contacté par EURACTIV.

Même avant la guerre, entre janvier 2021 et février 2022, l’Ukraine n’a passé aucun accord direct avec les entreprises d’armement bulgares. Celles-ci sont pourtant habilitées à produire des munitions adaptées aux armes soviétiques qu’utilisent largement les Ukrainiens.

Tant et si bien que les services de renseignement russes auraient inspecté de grandes usines militaires bulgares en raison de l’exportation supposée d’armes vers l’Ukraine.

Parallèlement, l’industrie de l’armement bulgare a enregistré des ventes record à l’étranger, principalement en Pologne et en Roumanie, à partir desquelles des armes auraient été acheminées en Ukraine, selon nos informations.

Programme de financement élaboré

Au plus fort de la guerre, la ministre de l’Économie Kornelia Ninova, leader des socialistes pro-russes en Bulgarie, avait d’ailleurs dit haut et fort qu’elle interdirait l’exportation d’armes bulgares vers Kiev.

Une politique qui avait changé une fois le gouvernement évincé en juillet 2022. Le Parlement bulgare avait alors décidé, à une large majorité, de fournir une aide militaire à l’Ukraine. Le président Rumen Radev, pourtant opposé à cette idée, avait donné son feu vert.

« Les entreprises d’armement bulgares ne vendent pas d’armes et de munitions directement aux entreprises ukrainiennes », a déclaré à EURACTIV Bulgarie Velizar Shalamanov, ancien ministre de la Défense par intérim, ancien président du comité de surveillance de l’Agence de communication et d’information de l’OTAN, et désormais directeur au Club Atlantique de Bulgarie.

Tout passe par un programme de financement élaboré, qui requiert la participation de pays tiers, et notamment du Royaume-Uni et des Etats-Unis, d’où transitent les fonds.

« L’argent nécessaire pour acheter les armes ne vient pas d’Ukraine, mais de Grande-Bretagne, des États-Unis ou encore de Pologne », précise M. Shalamanov. Les achats, en pratique, se font par l’intermédiaire de sociétés qui ne sont pas ukrainiennes.

Les annonces du gouvernement d’interdire toute vente direct, du moins au début de la guerre, ont mené à nouvelle « approche triangulaire », où les armes sont officiellement vendues à un pays tiers avant d’arriver officieusement en Ukraine, explique M. Shalamanov.

« Toutes les parties prenantes y trouvent leur compte », a-t-il expliqué. M. Shalamanov a récemment plaidé pour que la Bulgarie livre tous ses chars et véhicules blindés de l’ère soviétique et les remplace par des « équipements modernes provenant de nos alliés, ce qui permettrait d’accélérer notre réarmement ».

Une série de sabotages contre des usines d’armement bulgares au lendemain de l’annexion de la Crimée ainsi que la tentative de meurtre d’un homme d’affaires du secteur de l’armement, pour laquelle le parquet bulgare soupçonne les services secrets russes, constituent l’une des preuves que la Bulgarie a exporté une quantité importante d’armes vers l’Ukraine, même avant la guerre, ont révélé de multiples sources à EURACTIV.

Contourner les voies officielles

Lors d’un entretien télévisé le 25 janvier, l’ancien directeur exécutif de la plus grande usine militaire d’État à Sopot, Ivan Ivanov, a déclaré que la Bulgarie n’exportait pas d’armes et de munitions vers l’Ukraine.

La Bulgarie entretient des relations commerciales officielles avec plus de 60 pays, principalement par l’intermédiaire de sociétés qui disposent d’une licence et de l’approbation de la commission bulgare en tant qu’« utilisateur final » — ce dont l’Ukraine ne bénéficie pas.

« Je suis donc profondément surpris que l’actuel ministre intérimaire de l’Économie [Nikola Stoyanov] continue de soulever la question des armes. Il devrait savoir qu’en parlant constamment du complexe militaire et industriel, il nuit à la Bulgarie, il nuit à ce secteur de l’économie bulgare », a souligné M. Ivanov.

Le sujet a fait la une des journaux après la publication d’un article du journal allemand Die Welt, selon lequel le gouvernement dirigé par le Premier ministre Kiril Petkov et le ministre des Finances Asen Vassilev a entamé une procédure secrète pour envoyer à l’Ukraine une aide militaire à grande échelle. Cette aide, composée notamment de munitions et d’armes, aurait transité par différents canaux afin de contourner les livraisons d’armes officielles.

Source: Euractiv

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