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Guerre Israël-Hamas: La Tension Monte Entre L’ÉTat Hébreu ET la Russie

De notre correspondante à Moscou, 

Vladimir Poutine avait attendu une semaine avant d’appeler Benyamin Netanyahu et de faire savoir qu’il présentait ses condoléances « aux proches des victimes ».  Un geste contraire aux usages diplomatiques avec un pays considéré comme un partenaire proche. Le président russe avait aussi comparé le siège de Gaza au blocus de Leningrad, qui avait fait environ 800 000 morts pendant la Seconde Guerre mondiale.

Avec la visite du Hamas à Moscou, cette fois, Israël signifie qu’une ligne rouge a été franchie, et a déclaré via son ministère des Affaires étrangères jeudi soir « considérer l’invitation de hauts responsables du Hamas à Moscou, comme une mesure obscène qui soutient le terrorisme et légitime les atrocités des terroristes du Hamas ».

Le mot « terrorisme », lui, n’est apparu pour la première fois dans la bouche de Vladimir Poutine qu’il y a deux jours. Lors d’une réunion mercredi avec des représentants religieux – une réunion comme il en tient régulièrement – le président russe affirmait ainsi : « La Russie a connu et sait ce qu’est le terrorisme international ». Avant d’ajouter : « Je tiens sincèrement à exprimer mes condoléances aux familles des Israéliens et des citoyens d’autres pays dont les proches ont été tués ou blessés lors de l’attaque du 7 octobre ». À aucun moment, Vladimir Poutine ne nomme le Hamas, ni ne le rend responsable. L’organisation n’est du reste pas labellisée comme « terroriste » par Moscou et se rend régulièrement dans la capitale russe. Il est à noter que les talibans sont eux classés « terroristes » par la Russie, mais que leurs délégations se rendent régulièrement dans le pays. Ils étaient ainsi présents au Forum économique de Saint-Pétersbourg en juin 2022 et 2023.

La Russie, « un pays ami du peuple palestinien »

Pour répondre à la diplomatie israélienne, la Russie a choisi deux canaux, s’exprimant dans la droite ligne des propos présidentiels précédents, soit une condamnation du terrorisme dans des termes généraux. D’abord via son ambassade en Israël, qui a publié ce vendredi un long communiqué, précisant notamment : « Nous condamnons fermement le recours à des méthodes terroristes, y compris le meurtre de civils, la prise en otage de femmes, de personnes âgées et d’enfants, qui doivent être libérés (…). Il est absolument inacceptable de nous accuser de soutenir le terrorisme (…) de remettre en question le travail ciblé de notre pays pour résoudre les tâches humanitaires (…) dans l’intérêt des citoyens de la Russie, d’Israël, de la Palestine et d’autres pays ».

Le porte-parole du Kremlin a lui ensuite déclaré : « Le terrorisme, dans aucune de ses manifestations, ne peut être justifié d’aucune façon. Cela correspond absolument à notre position constante, qui a été exprimée à plusieurs reprises par le président de la Russie. Quant à la bande de Gaza, il y a en effet une catastrophe humanitaire en cours, qui fait l’objet de l’attention et de la plus profonde préoccupation de presque tous les pays », estime Dmitri Peskov.

Ce vendredi matin, dans le journal Kommersant, le représentant de la délégation du Hamas à Moscou, Abu Hamid déclarait notamment : « La Fédération de Russie est un pays ami du peuple palestinien ». Il y déroulait aussi ses arguments et sa revendication d’un cessez-le-feu pour libérer les otages.

Un choix assumé 

L’épisode montre surtout le choix assumé de se distancer d’un pays autrefois considéré comme un partenaire proche

Les événements du 7 octobre ont d’abord été considérés par la Russie comme un moment pour tenter de se présenter comme un meilleur médiateur. Les premiers propos de Vladimir Poutine avaient été en effet pour fustiger Washington. « Il s’agit d’un exemple clair de l’échec de la politique des États-Unis au Moyen-Orient », déclaration du président russe faite le 10 octobre.

En mesure de parler à tous les acteurs de la région, Moscou avait de bonnes cartes en main pour essayer de rompre son isolement, se trouver un espace sur la scène internationale. Sauf que la Russie a ensuite vu dans l’enchaînement des événements l’occasion d’alimenter sa guerre des récits avec l’Occident, plus particulièrement son argumentaire ancien et récurrent sur un supposé deux poids deux mesures de l’Ouest.

La priorité pour Moscou aujourd’hui est donc avant tout d’affaiblir le camp qui soutient Kiev et de renforcer son influence vis-à-vis des pays du Sud.

Confirmant, s’il en était encore besoin, qu’aux yeux du pouvoir, l’Ukraine est la mère de toutes les batailles. Même au prix d’apparaître comme légitimant le Hamas après le 7 octobre. Même au prix d’abîmer sa relation ancienne et établie avec Israël.

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