« La question c’était comment est-ce qu’on peut faire entendre sa voix ? Sans rajouter de la violence à la violence, sans que la violence par laquelle on chercherait à s’exprimer se retourne en répression contre soi. »

Farid L’Haoua fait partie des marcheurs de la première heure. Il a alors 25 ans. « Alors moi, je pars à Valence. Et là, mes camarades m’ont demandé de rester et surtout de donner un coup de main pour faire en sorte que ça se passe bien. Il y a très peu d’historiens qui se sont intéressés à cette histoire de la marche, inspirée elle-même des marches de Gandhi, des marches de Martin Luther King. Et surtout, vu le contexte social et politique, on s’est dit qu’il fallait peut-être être un peu plus visible pour ces temps-là. Il y a une concordance quand même, une montée de la violence phénoménale. »

Une mobilisation toujours d’actualité

Allusion notamment aux émeutes qui ont embrasé la France fin juin, après la mort du jeune Nahel, tué à bout portant lors d’un contrôle policier. Les deux hommes ont décidé de participer activement aux commémorations du 40e anniversaire de la marche, face à une histoire qui semble bégayer.

« Un mélange de tristesse et de colère. Parce que ça fait maintenant plus de 40 ans que nous sommes un certain nombre à dire qu’il y a un vrai problème dans cette société française, de relations entre l’institution policière et les jeunes qu’on appelle des quartiers sensibles ou issus de la diversité. Ce dont je suis sûr, c’est que la police française n’est pas guérie de l’histoire de la guerre d’Algérie. C’étaient les circonstances. Elle a été habituée à contrôler les visages maghrébins. On est passés du contrôle des jeunes des quartiers, qui commençaient à devenir remuants à la fin des années 1970 et issus de cette histoire post-coloniale, aux Maghrébins susceptibles d’être un suppôt du terrorisme. »

Une nouvelle marche serait-elle possible ? Les deux hommes n’y croient pas. Pour Farid L’Haoua, cet espace d’expression est désormais impossible. « Les mouvements des gilets jaunes, ça a été quand même d’une violence phénoménale. Quand je vois tous les mouvements autour des retraites, il n’y a rien qui est passé. Moi, ce que j’espère c’est que cette marche, elle continuera à être un rêve devant nous et un rêve qu’on aura envie de nourrir et qu’aujourd’hui, il y a encore lieu de se battre. »

Les deux amis se sont donné rendez-vous ce samedi à Marseille où sera commémoré le départ de la marche. Ils y retrouveront d’anciens camarades et tous ceux qui ont encore envie de se battre.

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